Archives du Cantal

Vacances, j'oublie tout ?

Vacances, j'oublie tout ?

Les grandes vacances se terminent et des millions d’élèves, plus ou moins enjoués, vont devoir faire leur retour en classe. Deux mois se sont écoulés et certains apprentissages semblent déjà loin, à l’avis de certains professeurs et parents. Les universitaires et professionnels de l’éducation, qui travaillent à cette question depuis plusieurs décennies, parlent de perte des acquis scolaires en période estivale. Ils ont mis en avant l'effet négatif d'une longue pause sur la capacité des élèves à se souvenir des connaissances et à mobiliser les compétences qu'ils avaient acquises pendant l'année scolaire. Les études publiées depuis près de quarante ans ont montré qu'au cours de l'été, les élèves perdent en moyenne l'équivalent d'un mois d'apprentissage dans des matières comme les mathématiques et l'orthographe.

Les documents présentés par les Archives du Cantal, en ce mois de septembre, pourraient permettre d’évaluer le niveau des élèves et le degré d’importance de cette éventuelle perte de connaissances estivale. Il s’agit de tests d’acquisitions scolaires en français et mathématiques élaborés pour les classes de troisième et seconde, datant du début des années 1960 et provenant du fonds du collège Notre-Dame-des-Miracles de Mauriac en cours de classement. Ces tests permettaient aux enseignants d’effectuer une évaluation des acquisitions de l’élève, sur l’ensemble du programme de l’année qui s’achevait. A l’inverse, utilisés en début d’année scolaire, ces tests pouvaient aider à détecter chez l’enfant, les difficultés et lacunes du programme de l’année précédente.

A cette époque, il n’y avait pas encore d’évaluations nationales pour les élèves de primaire, du collège et du lycée. Les premières expérimentations sont nées en 1974. Il s'agissait, alors, de répondre aux enjeux du collège unique qui allait naître en 1975 et de s'assurer que la démocratisation de l’enseignement allait s’accompagner d’une standardisation du niveau des élèves. Il n’y a alors aucune obligation légale de mettre en place ces évaluations pour les enseignants, lesquels restent très attachés à leur « liberté pédagogique ». C’est au milieu des années 1980 qu’elles vont peu à peu se systématiser. En 1993, une enquête révèle que plus de sept enseignants sur dix considèrent ces évaluations comme un moyen efficace pour déceler les difficultés des élèves, et 55% des enseignants disent avoir changé leur manière d’enseigner[1]. Aujourd’hui, au niveau national, chaque élève de seconde générale et technologique ou professionnelle passe un test de positionnement en septembre qui lui permet d’identifier ses acquis et ses besoins en maitrise de la langue française et en mathématiques. Et si depuis quelques années, la question du niveau des élèves français fait souvent débat, comme on peut le voir avec ces documents, c’est une préoccupation déjà ancienne.

Dans les années 1960, au sein des établissements scolaires, ces tests ont surtout pour but d’aider les enseignants à mieux cibler et organiser l’apprentissage des élèves. L’épreuve de français comprend cinq parties, dont voici un petit aperçu. Un premier test de vocabulaire pour lequel il faut trouver le synonyme d’un mot parmi cinq choix proposés. Par exemple, péremptoire, est-il synonyme de décisif, prétentieux, fallacieux, méchant ou éternel ? Le deuxième test s’intitule « nature des mots ». Il s’agit cette fois d’indiquer la nature grammaticale d’un mot souligné dans une phrase : « Que de larmes n’ai-je pas versées ! ». Est-ce un pronom relatif, une conjonction ou un adverbe ? Le troisième test, peut-être encore plus redoutable, porte sur les accords. Il faut trouver, pour chaque phrase, le bon accord parmi trois propositions. Par exemple : « Personne n’e osé sourire de son enthousiasme » avec u, ut ou ût ? Vient ensuite un test sur la « fonction des mots » pour lequel il faut donner la fonction grammaticale du mot ou groupe de mots soulignés dans une phrase. « Ne fais rien dont tu ne puisses être fier » : sujet, attribut du sujet, complément d’objet direct, complément d’objet indirect ou complément de nom ? Enfin, l’inévitable épreuve de conjugaison où il s’agit de reconnaître le mode et le temps d'un verbe souligné dans une phrase. « Après que les enfants furent partis, Isabelle se mit au piano » : indicatif passé simple passif, indicatif passé antérieur ou subjonctif plus-de-parfait ? Il y a ainsi vingt propositions pour chacun des tests.

Le test de mathématiques, quant à lui, se compose de quarante questions. Les premières portent sur les racines carrées avec pour exemple la question n° 3 : « √28 + √63 = 5 √7, 7 (2 + 3) ou √91 ? », sur les fractions, ou encore les équations telles que la question n° 14 pour laquelle il s’agit de savoir si « x2 + 4 = 0 n’a pas de racine, possède une racine ou possède deux racines ». Viennent ensuite les fonctions et la géométrie avec ces fameux théorèmes comme dans la question n° 35 : « Si les mesures a, b, c des côtés d’un triangle sont telles que a2 = b2+ c2 on peut affirmer que ce triangle est rectangle, en appliquant… le théorème de Pythagore, la réciproque du théorème de Pythagore ou le théorème de Thalès » ?

On peut s’en apercevoir à la lecture de ces quelques exemples, ces tests d’acquisitions scolaires sont loin d’être simples ! Si quelques semaines de vacances suffisent à effacer une partie des connaissances acquises au cours de l’année scolaire, alors qu’en est-il après des années sans scolarité ? Au risque de réveiller certains mauvais souvenirs, chacun peut essayer d’en faire le test. Pour cela, nous mettons à disposition une version de chaque épreuve, et son corrigé, sur le site internet des archives.

Cotes ADC : 2299 W (en cours de classement)

Document rédigé par Nicolas Laparra

[1] « Histoires d'info. Les évaluations nationales, objets de divergences entre les enseignants et les politiques depuis les années 1970 » par Thomas Snégaroff

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