Archives du Cantal

Cahier de doléances de Pleaux : haro sur l’impôt (11 mars 1789)

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Signatures
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Ces « doléances, plaintes et rémontrances de la ville et paroisse de Pleaux » pourraient en fait se mettre au singulier : c’est une longue déploration de la lourdeur des impôts pesant sur cette pauvre paroisse de la Xaintrie auvergnate. Les Pleaudiens en appellent à la justice (nous dirions à la péréquation) du souverain. Les rédacteurs du cahier emploient avec une sorte de délectation tous les ressorts de l’élégie et de l’outrance. Qu’on en juge :

« S’il n’est point de province dans le royaume plus opprimée de toutes manières que celle d’Auvergne, elle ne renferme point de canton plus dévoué à l’oppression que Pleaux et les paroisses voisines. En effet, sans être exempté d’aucuns des malheurs communs à la province, cette contrée en a de particuliers, prets a la faire succomber sous leur poids ».

Les trois quarts des revenus sont mangés par les impôts royaux ; le reste se partage entre :

« rentes seigneuriales, nourriture et salaires des domestiques, entretien des batimens et aux charges de famille. Que reste-t-il donc pour la subsistance du misérable propriétaire et pour le laborieux cultivateur ? Rien. »

Les impôts (30.000 livres) sont à répartir entre 330 feux seulement.

« Le défaut de ressources pour payer les impôts et subsister necessite cette emigration opposée à l’inclination naturelle du Français, surtout de l’Auvergnat, idolatre de son Roi et de sa patrie : emigration qui enlève a la paroisse les deux tiers des proprietaires, à la terre autant de cultivateurs, à l’État autant d’individus (…) De tout quoi resulte la rareté des domestiques, l’excès de leurs salaires, le defaut d’agriculture, la mediocrité des recoltes, et mille autres suites funestes au maintient des familles. »

Cette tirade se termine habilement par un appel au monarque :

« La communauté de Pleaux laisse le soin de toutes ces représentations generales et importantes au zèle et a la sagacité des assemblées supérieures, et se borne au bref exposé de ses malheurs particuliers, persuadée que ses doléances malheureusement trop bien fondées lui attireront quelque soulagement ; comme celles de la nation entière procureront à l’État un avantage infini, et qui a été reservé pour faire les delices et la gloire d’un monarque, tendre pere et généreux deffenseur des victimes de l’oppression. ».

Suivent les signatures des représentants de Pleaux : Joseph Dapeyron de Cheyssial sindic, Pierre-Jean Fumel, bourgeois, Jean de Meilhac de Gibertet, Jean Armand, Antoine Rigal, Joseph Vaissières marchand, Jean-François Naudet docteur en médecine, Jean-Baptiste Lacroix maître chirurgien, Jean-Baptiste Damaison procureur d’office, Pierre Delsuc expert feudiste, Claude Delfraissy, Jean Lamouroux, Antoine Lachambre, Antoine Vaissière notaire.

Tous ces notables de Pleaux sont préoccupés d’une chose : le poids et l’inégalité dans la répartition du fisc royal. La crise de l’Ancien régime, qui provoqua la convocation des Etats généraux (« assemblée supérieure ») et précipita sa fin, est d’abord financière avant d’être politique.

Les Archives départementales conservent les cahiers de doléances du Tiers-État de toutes les paroisses du Cantal.

ADC, 17 B 54

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